Il hésite à poser devant son jet. Un petit avion de 6 places posé sur le tarmac d’Hammamet, prêt à décoller vers Ibiza, le meilleur moyen de locomotion pour David Guetta qui enchaîne les prestations dans une ville différente chaque soir. « On est Français, le succès suscite des jalousies chez nous. » Son carton plein n’est plus seulement hexagonal mais mondial, depuis le début de l’été : d’abord grâce aux Black-Eyed Peas dont le nouvel album, « The E.
N.D », est l’un des triomphes de la saison. David Guetta y a signé quelques productions dont le redoutable « I Gotta Feeling », déjà l’un des tubes de l’année. Parallèlement, sa propre chanson « When Love Takes Over », chantée par l’ex-Destiny’s Child, Kelly Rowland, s’est hissée à la première place du top anglais. Une première depuis dix ans pour un musicien tricolore. Et son nouveau single, « Sexy Bitch », interprété par Akon, est en tête des ventes sur Itunes depuis des semaines.« Tout ce que j’écoute depuis tout petit est lié aux Etats-Unis »
Alors cette fois, David Guetta peut parader, lui, « le petit Français » qui enthousiasme les stars américaines. Elles sont nombreuses sur son nouvel album, « One Love », sorti hier et promis à un avenir tout aussi radieux. Une fois de plus, le bidouilleur peut remercier les Black Eyed Peas. « J’ai travaillé avec le groupe dans le plus gros studio de Los Angeles. Plein d’autres artistes y étaient au même moment. Je voyais défiler des stars comme Puff Daddy, Busta Rhymes, Pharrell Williams, qui venaient écouter ce que l’on faisait, un son qu’ils n’ont pas chez eux. »
A partir de là, son téléphone n’arrête pas de sonner. « Beaucoup me demandaient des musiques et je leur répondais : OK, mais tu viens chanter sur mon prochain album. » Sur « One Love », Guetta s’est offert ainsi un casting de luxe : Akon, Will.I.Am, Kid Cudi, Estelle, Kelly Rowland, soit la crème du R’n’B anglo-saxon. « Et c’est l’album qui m’a coûté le moins en production, ajoute-t-il les yeux brillants comme un gamin. C’est hallucinant pour moi. Tout ce que j’écoute depuis tout petit est lié aux Etats-Unis. Ma femme, Cathy, me parle de trucs de son enfance genre Sheila. Je ne connais pas. Moi, c’était le funk des cités. »
Car avant la gloire, David Guetta a grandi porte d’Orléans entre un papa sociologue militant et une mère prof de philo, « intellos de gauche, milieu populaire. » Son grand frère, Bernard Guetta, est devenu journaliste, éditorialiste à France Inter. « Moi, j’étais un ado turbulent, dans un lycée un peu chaud. La musique m’a aidé à canaliser mon énergie.
Sinon, cela aurait pu mal tourner. »
« Les médias chez nous n’ont aucune conscience de ce que je suis »
DJ même pas majeur « pour 400 francs par soir », il se professionnalise en 1989 lors de la rencontre avec sa future femme, Cathy. « Elle était serveuse aux Bains, moi aux platines, tout en continuant mes études d’économie. J’avais 21 ans, j’avais repris les Folies Pigalle et je vivais encore chez mes parents. Cela devenait un business. » Le couple franchit le bas, dirige plusieurs clubs avant de tout revendre, « pour en finir avec les convocations au commissariat suite à la bagarre de la veille, le plombier à appeler pour la fuite d’eau »…
Désormais, David Guetta se concentre sur la musique. « Les médias chez nous n’ont aucune conscience de ce que je suis, ce que je fais réellement. Je n’ai jamais eu de Victoires de la musique. On parle toujours de groupe français electro comme Justice qui s’exportent, mais je vends beaucoup plus qu’eux. » Aujourd’hui, l’Amérique lui tend les bras « sans se poser de questions ». Le jet est déjà prêt à redécoller pour Los Angeles.
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